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Vinitiques #21 : le marché de l’évaluation du vin

Lors de la dernière édition des Vinitiques, Magalie Dubois, doctorante en économie du vin à l’Université de Bordeaux, nous a présenté l’histoire et les nouvelles tendances de l’évaluation du vin.

 

 

Mieux comprendre l’évaluation du vin

Il faut remonter à l’antiquité pour trouver les premiers influenceurs… Homère – Dans l’Illiade et l’Odyssée, vante les mérites des vins Pramniens, originaires de l’ile d’Icare au large de la Turquie actuelle. Horace présente les vins des îles de Chios et de Lesbos en l’an 8 avant JC. De même Pline l’ancien évoque sa préférence pour les vins de Falerne en Italie, en l’an 23 après JC : « L’homme doit au vin d’être le seul animal à boire sans soif.

Aujourd’hui cette évaluation tend à être objectivée par la science, avec des modèles économiques prenant en compte les facteurs météorologiques, des nez électronique,… Mais la qualité du vin reste un concept multidimensionnel. Il faut intégrer la nature du vin évalué. Un vin fin se juge avec une vision esthétique presque artistique alors que l’évaluation de la qualité de la grande majorité des vins se limite à l’absence de défauts œnologiques ou la typicité.

L’enjeu économique est important : la perception de la qualité est le concept central de la création de valeur. Il s’agit au final de guider les préférences des consommateurs et de peser sur l’acte d’achat.  De nombreux consommateurs sont dans l’incertitude, face à des milliers de producteurs, des centaines de variétés et des centaines de milliers de vins. Ils s’appuient pour effectuer leur décision d’achat sur des signaux de qualité, qu’ils soient intrinsèques ou extrinsèques (concours et médailles). Mais il n’y a pas que le consommateur qui a besoin des notes, elles sont utilisées par les commerçants, les producteurs, les acheteurs pour faciliter les ventes…

 

(c) Timur Saglambilek

 

 

Le tournant des années soixante-dix

Dans les années soixante-dix, le vin aliment devient une boisson plaisir. C’est l’époque du développement des normes de qualité. L’évaluation sensorielle s’établit comme une science, elle devient réplicable grâce à la création d’outils comme le verre INAO, outil de dégustation encore utilisé aujourd’hui. Les premières publications sur le vin destiné aux consommateurs apparaissent, avec évaluations et conseils d’achat. En France Gault & Millau parait pour la première fois en 1973. Au Royaume-Uni The Vine et Decanter voient le jour en 1975, et aux Etats-Unis, Wine Spectator est lancé en 1976 et Wine advocate en 1978. La Note sur 100 de Parker est une innovation évaluative forte, copiée du système éducatif américain et donc intuitivement compréhensible : pas besoin de vocabulaire, peu importe la langue. C’est devenu une classification standardisée, une norme mondiale dans l’industrie. Le vin est  aujourd’hui le seul produit dont la qualité est chiffrée.

Le marché de l’évaluation s’est rapidement développé et a pris une nouvelle dimension avec l’apparition d’Internet et des réseaux sociaux. Aujourd’hui Wine Spectator, Wine Enthusiast et Wine & Spirits totalisent plus de 750 000 abonnés. Les revenus tirés de la publicité et des abonnements ou des ventes sont importants et posent l’épineux problème de l’indépendance. Avec internet l’évaluation du vin est aussi confrontée à l’atomisation des avis : on compte plus de 1 milliard de comptes Instagram actifs chaque mois dans le monde… Les vins ordinaires et fins sont souvent jugés selon les mêmes critères. Chaque vin est en concurrence avec plusieurs milliers d’autres vins pour l’attention des critiques. La gestion de la réputation devient aussi importante que la gestion des revenus et la communication de la qualité est devenueune stratégie business. Aujourd’hui on peut aussi se demander si le prix du vin ne sera pas mieux expliqué par ses scores dans la communauté en ligne que par les scores d’experts

 

 

 

Vivino

La plus parfaite illustration de cette atomisation des avis est sans doute le site américain Vivino. De 10 millions d’utilisateurs et 133 Millions d’étiquettes scannées en 2015, l’apllication est passée à 42 millions d’utilisateurs et 1 milliard d’étiquettes scannées en 2020. La plateforme est aussi devenue un outil de vente avec 265 million de $ de ventes mais sa valeur est avant tout contenue dans la Data. L’évaluation est axée consommateur : 5 avec la possibilité d’attribuer des demi points. La dernière actualisation permet aux utilisateurs d’attribuer une note plus précise, cette introduction de décimales apportent de la  finesse dans la notation. En outre certains utilisateurs rajoutent une note sur 100 en commentaire…

Ce type de plateforme promeut l’évaluation de tout par tous plutôt que seulement les meilleurs (vins) par seulement les meilleurs (dégustateurs), Le goût personnel (évaluation hédoniste générale) prévaut sur l’évaluation de la qualité, et cela est sans doute plus pertinent lors du choix d’un vin. C’est une mémoire virtuelle qui permet l’achat en ligne, elle rapproche donc évaluation et marketplace. La gamification de l’application (classement des utilisateurs par pays) pousse ses utilisateurs au commentaire et ses aficionados tendent ainsi vers l’expertise.

Ce type de plateforme peut être considérée comme le futur de l’influence. La note vivino a déjà autant ou plus d’importance que la note d’un expert. Plus encore, ses algorithmes peuvent déceler la naissance de tendances de consommation sur les marchés. Déjà Vivino intègre des  partenariats producteurs, leur permettant de suivre les étiquettes les plus scannées, l’évolution des avis dans le temps, les comparaisons avec d’autres marques…

 

 

Bordeaux Université

L’ambition scientifique de l’université de Bordeaux se fonde sur le dynamisme de communautés de recherche internationalisées, structurées en 11 départements thématiques, et sur le soutien à sept grands programmes de recherche. C’est une politique d’excellence, nourrie de partenariats intenses avec les organismes de recherche et les acteurs socio-économiques, orientée vers les transitions environnementales et sociétales, et ancrée dans un dialogue ouvert avec la société.

www.u-bordeaux.fr

Vinitiques

Les Vinitiques sont nées d’une volonté commune du Pôle Digital Aquitaine, du Cluster Inno’vin et des technopoles Bordeaux Montesquieu et Unitec, d’inventer un lieu convivial et propice aux rencontres et aux échanges d’informations entre les filières du vitivinicole et des technologies numériques, électroniques et informatiques. Lancé en 2012, l’événement Les Vinitiques est un rendez-vous bi-annuel à destination des professionnels.

vinitiques.com

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