Accueil / Reportages / La tradition exclut-elle l’innovation ?

La tradition exclut-elle l’innovation ?

Face à la crise profonde qui perturbe depuis quelque temps le vignoble Bordelais, certains vignerons, qui ne sont pas tombés dans le désespoir ni la résignation, essaient et parviennent à innover de manière assez prometteuse.

 

Le monde change et la consommation de vin aussi. Le monde du vin pour survivre ne peut se reposer uniquement sur ses traditions. Il doit les faire vivre et pour cela savoir s’adapter à l’évolution de la consommation. Les nouveaux consommateurs boivent moins, mais ils boivent aussi différemment.

 

 

L’exemple de Stéphane Defraine

 

L’Entre-Deux-Mers, vaste territoire viticole s’il en est, est fortement touché par cette crise, cruelle mais prévisible pour certains. Un exemple parmi d’autres, Stéphane Defraine, belge de nationalité, arrivé il y a une trentaine d’années sur ce beau coin de terre de la région bordelaise. Ex président de l’appellation Entre-deux-Mers, membre du CIVB, il fait partie de ces producteurs qui ont beaucoup donné à cette région hospitalière. Cette dépression, aujourd’hui profonde, il l’appréhendait comme bien d’autres mais il ne s’attendait pas à une telle ampleur ni à une telle désaffection.

 

Cependant, à l’écoute des consommateurs, il a commencé il y a quelques années à adapter son offre de production à la demande. Produire plusieurs vins en AOC mais aussi en Vin de France a été sa solution. Quatorze cuvées différentes sont aujourd’hui mises en marché et commercialisées en direct.  Du vin  » Sans Soufre Ajouté  »  aux Bordeaux classiques dont il est un fer de lance efficace, il a osé entreprendre. S’il reste fidèle aux appellations Bordeaux et Entre Deux Mers ainsi qu’aux cépages locaux qui ont fait la réputation des Bordeaux, il fait aussi la place désormais à des vins différents, aux vinifications particulières et qui correspondent aux souhaits de la clientèle. L’AOC n’est donc plus le Graal absolu.

 

 

Une solution certes mais est-elle miraculeuse ?

 

Cette mutation est poussée par l’intérêt croissant pour de nouveaux vins de la part de la clientèle. A l’export, cavistes et sommeliers soulignent leur intérêt pour ces nouveaux vins produits dans les meilleurs terroirs de Bordeaux. D’autres, comme Sylvain Destrieux à Ruch vont jusqu’à positionner leurs Vins de France bien plus chers que leurs Bordeaux qui devient leur entrée de gamme. N’y a t’il pas sur ce point précis d’ailleurs un risque de déprécier purement et simplement les vins qui ont fait la réputation du plus grand vignoble du monde…

 

Localement, cependant, cela n’empêchera pas une rapide transformation du vignoble de cette région vers des horizons plus agricoles ou forestiers. Seuls les meilleurs terroirs resteront viticoles à part entière. Mais le mouvement est lancé, d’autres vignerons, plus audacieux encore, n’hésitent pas à se lancer dans des plantations de cépages plus adaptés au réchauffement climatique.

 

 

Nous reviendrons prochainement sur d’autres approches novatrices qui se multiplient dans la région. Elles existent. Le tout est de le vouloir, et de le pouvoir…

 

 

Bernard Sirot
Journaliste et dégustateur Vintaste

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *