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Carnet de Vendanges Septembre 2020

Premier bilan des vendanges 2020 avec Pascal Hénot, Romain Bocchio, Jean-Christophe Mau, Pascal Fricard et Michel Guillard. Photo JB Nadeau.

 

Pascal Hénot, Consultant Enosens, « 2020 : une millésime précoce de très belle qualité», le 26 septembre.

Le millésime 2020 se caractérise par un climat chaud toute l’année, avec une pluviométrie contrastée : très humide en automne (2019) et au printemps (2020) mais exceptionnellement sèche en été. L’hiver particulièrement chaud favorise un débourrement précoce avec 15 jours d’avance sur la moyenne.
Avril, chaud et humide, favorise une pousse active, permettant à la vigne de maintenir son avance. Début mai, très humide, ralentit la pousse ; les sols sont gorgés d’eau, difficilement praticables, avec parfois des phénomènes d’asphyxie racinaire, rendant difficile la protection du vignoble.
Ce climat chaud et humide au printemps, entraine une pression Mildiou très forte. Fin mai-début juin les attaques de mildiou sur grappe entrainent des pertes de récoltes importantes dans certaines situations. Le printemps chaud et humide favorise une Floraison particulièrement précoce avec 12 jours d’avance sur la moyenne, plaçant 2020 parmi les millésimes les plus précoces, avec 2003 et 2011.

L’été est chaud avec périodes caniculaires. Le 07 août est la journée la plus chaude de l’année, avec des températures supérieures à 40 °C. La sècheresse s’installe à partir du 20 juin jusqu’au 10 août, soit une période de 50 jours avec moins de 10 mm de pluie ! Le déficit hydrique sur juillet/août est de – 60%. La plante réagit différemment selon les terroirs : stress hydrique important avec défoliation et flétrissement pour les terroirs filtrants et les jeunes vignes, meilleure adaptation dans les sols profonds grâce aux réserves hydriques accumulées. Il en résulte une grande hétérogénéité au niveau du vignoble.

La Véraison s’enclenche la dernière décade de juillet, en pleine période de sècheresse. Elle est lente mais régulière, avec une mi-Véraison le 29 juillet, soit 8 jours d’avance sur la moyenne. Chaleur et sècheresse de l’été ont fait perdre une partie de l’avance du millésime (15 jours d’avance au débourrement, 12 jours d’avance à la floraison, mais seulement 8 jours d’avance à la véraison). A partir de la véraison et durant tout le mois d’août, le climat est caractérisé par des journées particulièrement chaudes, mais des nuits également chaudes, avec une faible amplitude thermique jour/nuit. Le début du mois est marqué par une semaine de canicule. Durant cette période, la plante consomme rapidement son Acide Malique, tout en chargeant lentement les Sucres et la couleur (Anthocyanes).

 

On est dans un schéma de maturation lente, avec un déséquilibre Sucres/Acides dans les baies. A partir de fin août, des nuits fraiches relancent l’accumulation des Sucres dans la pulpe et des Anthocyanes dans la pellicule, tout en freinant la dégradation des Acides ; l’équilibre Sucres/Acides se rétablit. La Maturité Technologique (maturité de la pulpe) est atteinte pour les Merlots vers le 05/10 septembre selon la précocité des parcelles. Les Maturités Phénoliques et Aromatiques (maturité de la pellicule) sont, elles, une nouvelle fois, décalées. La dégustation des baies révèle des arômes de fruit frais à partir de la première semaine de septembre, les notes fruits mûrs apparaissant vers le 10, date de démarrage des vendanges dans les secteurs précoces, et vers le 20 dans les secteurs plus tardifs, date de vendanges généralisées, soit avec une semaine d’avance sur les moyennes.

 

Au moment de la récolte, suite à la sècheresse de l’été, les baies présentent des peaux épaisses et croquantes, avec une chair encore un peu gélatineuse. Le potentiel qualitatif apparait très bon. Dans certains terroirs soumis au stress hydrique, les baies se flétrissent, avec perte de volume parfois importante. Dans tous les cas, l’état sanitaire est lui parfait. Les premières cuves vendangées fermentent vite et libèrent rapidement une très belle matière : couleurs intenses, arômes de fruits noirs, rondeur et richesse tannique, laissant présager un très beau millésime 2020. A suivre…

Enosens Coutras

 

Romain Bocchio, consultant associé chez Derenoncourt Consultants « un millésime tout en contraste », le 24 septembre.

Le millésime 2020 est un millésime tout en contraste, techniquement assez difficile et surtout extrême dans la viticulture. Du point de vue de la météo, nous observons 2 millésimes en 1 sur ce mois de septembre avec des chaleurs excessives en début de mois et des températures plus douces et automnales en fin de mois. Les vieilles vignes bien enracinées et équilibrées n’ont pas souffert des fortes chaleurs et connaissent une maturité linéaire. Les sols avec des matrices moins argileuses ou des vignes plus jeunes connaissent des phénomènes de blocage qui sont régulés par les pluies salvatrices qui permettent d’harmoniser les maturités. Sur le terrain, c’est donc un véritable challenge, l’ordre de ramassage historique et classique est bouleversé, il faut s’adapter.
La qualité est bonne, les raisins sont murs mais les quantités sont plus faibles que l’année dernière en raison de la sècheresse et du mildiou du printemps par endroits.
C’est un millésime stratégique dans lequel la qualité de la viticulture va permettre d’absorber les excès du climat. Il s’agit d’un millésime de richesse phénolique et de potentiel tannique important qu’il faudra vinifier avec soin et retenue

Derenoncourt Consultants

 

Jean-Christophe Mau, vigneron au Château Brown : « premier bilan après la récolte des cépages blancs », le 24 septembre.

Nous avons commencé le ramassage des cépages blancs dès le mercredi 26 août, avec le Sauvignon Blanc : des vendanges historiquement précoces. Nous avons terminé avec nos Sémillons le lundi 7 septembre. Les rendements pour les blancs sont un peu moins généreux que l’année dernière. En 2019, nous étions à 48 hl/ha ! Cette année nous revenons sur des rendements plus classiques à 38 hl/ha. La sécheresse est sans doute arrivée plus tôt et les cépages blancs sont arrivés rapidement à maturité, les baies étaient alors gorgées de sucres mais moins pulpeuses. À la dégustation les jus des sauvignons blancs sont très aromatiques avec des notes d’agrumes, de fruits exotiques et de fleurs de Lilas. Les jus sont désormais en barriques et achèvent leur fermentation alcoolique.
Pour les cépages rouges, les Merlots ont été ramassé dès mi-septembre et jusqu’au 22 septembre, en parfait état sanitaire. Les premiers jus sont très aromatiques et très colorés ! Quant au Cabernet Sauvignon, notre cépage le plus tardif, la pluie des derniers jours a relancé sa maturité ce qui va nous permettre de commencer leur récolte à partir du 28 septembre. La pluie qui se faisait désirer va nous aider: les peaux vont s’affiner, l’aromatique va se peaufiner, les baies seront moins concentrées et avec plus de jus !

Château Brown

 

Pascal Fricard au Château Grand Ormeau : « un contexte climatique et sanitaire au combien particulier », le 24 septembre.

La crise sanitaire nous a obligé à nous adapter dès le début car les conditions climatiques de l’automne 2019 et du début d’hiver ont mis en place des conditions d’un démarrage rapide du cycle de la vigne. Du point de vue climatique, ce millésime va figurer dans le top 5 des millésimes précoces sur ces 20 dernières années.
Après un hiver particulièrement pluvieux et doux, le printemps démarre avec des températures très favorables à un débourrement précoce avec près de 15 jours d’avance par rapport à l’année dernière. Mais ces conditions météorologiques sont également très favorables au mildiou, nous obligeant à relever notre niveau de vigilance et à entamer notre protection plus tôt. Dans une atmosphère printanière voir estivale, la fleur s’est déroulée dans des conditions idéales avec chaleur et pas de pluies. Ce temps beau et chaud va se mettre en place durablement, même si le début de l’été est plus frais que l’année passée. A partir de la mi-juillet, les températures s’élèvent et la moyenne de cette année se situe dans les 3 plus chaudes depuis 2000.
La véraison et le début de la maturation des baies vont se dérouler dans des conditions hydriques très contraignantes pour nos vignes implantées dans nos parcelles de graves. Cela va avoir pour principale conséquence, une diminution de la taille des baies de Merlot, et des baies de Cabernet qui ont du mal à grossir.
Les conditions très favorables de début septembre vont nous permettre de temporiser un peu le début des vendanges. Les premiers coups de sécateurs ont donc été donnés le 10 septembre avec les premiers merlots, en particulier avec les parcelles qui ont le plus été impactées par le manque d’eau. Les Cabernets ont suivi, la semaine du 22 septembre pour se terminer le 25.
Les premières cuves montrent un bon équilibre entre l’alcool, l’acidité et les tanins. Les potentiels « couleur » et « arômes » sont importants cette année. La concentration en tanins est importante, ce qui équilibre certain manque en acidité sur certaines cuves. Le niveau d’alcool reste encore élevé cette année. En règle générale, les fermentations alcooliques se déroulent bien. Il faudra néanmoins rester prudent sur les fins de fermentation et les phases de macération.

 

Michel Guillard au Vignoble des Hauts de Talmont : « Une récolte exceptionnelle pour nos colombards », le 22 septembre.

Le bilan est provisoire bien sur puisque les vendanges ne sont pas terminées à ce jour mais notre récolte de colombard est probablement la plus exceptionnelle que nous ayons jamais eue ! Le rapport sucre et acidité est remarquable. Il suffit pour s’en convaincre de regarder les grappes récoltées dans un état sanitaire parfait… Notre terroir de calcaire crayeux (campanien 5) a joué son rôle en restituant de l’eau pendant la longue période de chaleur et de sécheresse que nous avons vécus cet été. Ensuite les 80mm d’eau tombés après le 15 aout ont été très bénéfiques. De très belles perspectives s’ouvrent pour ce colombard 2020…

Vignoble Les Hauts de Talmont

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