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Vinitiques #25 : la data, le meilleur intrant contre le mildiou

Lors de la dernière édition des Vinitiques, Tristan Roze des Ordons, conseiller viticole chez Phloème, a expliqué l’importance d’avoir des bases de données techniques à jour pour lutter efficacement contre le mildiou.

 

 

Le mildiou est aujourd’hui le plus important problème technique de la viticulture à Bordeaux, il cause des dégâts très importants depuis 2018, à cause de trois facteurs principaux : le changement climatique qui bouleverse les conditions de développement du champignon, la baisse drastique des solutions chimiques disponibles (plus de traitements systématiques), et l’absence de modélisation récente. En effet, les stratégies de traitement, les seuils, se basent sur des données épidémiologiques obsolètes, datant des années 80.

Il faut faire mettre à jour nos connaissances sur le mildiou pour faire progresser la lutte. Heureusement, des outils numériques d’acquisition de données, de cartographie, de gestion de base de données sont aujourd’hui démocratisés. Ils permettent à la fois de gagner du temps sur le terrain, de professionnaliser les échanges avec les viticulteurs, mais aussi de capitaliser les données récoltées sur le terrain.

 

 

 

Le Vigielab

 

Le VigieLab est un laboratoire de données au service des viticulteurs. Il n’est pas un projet annexe et fait partie du cœur de l’expertise de Phloème. Pour son travail de conseil, Phloème a développé des outils de cartographie, d’enregistrement des observations et des interventions réalisées sur les parcelles. L’objectif est de réaliser des fiches de visite en temps réel à destination des décideurs, mais aussi des bilans techniques et économiques des exploitations. L’entreprise a également conçu un extranet sur mesure, outil collaboratif de saisie et de gestion de base de données, relié à une base cartographique de 7 000 parcelles. Les conseillers réalisent des visites sur le terrain chaque semaine, l’entreprise structure ensuite ces observations pour les traiter en base et en faire des séries. 600 parcelles sont visitées en moyenne chaque semaine pour environ 200 propriétés viticoles. Chaque parcelle est visitée 10 fois en moyenne au cours de la saison.

 

En 4 ans, l’entreprise a investi 450 000 €, soit 16 % de son chiffre d’affaires, dans ces outils et dans le développement des compétences des salariés. Fin 2024, près de 45 000 relevés d’observation parcellaire avaient été enregistrés, après 4 saisons d’activité de Phloème, reliés à la cartographie, soit environ 650 000 données unitaires. Ces données, sous-produit de l’activité de conseil, sont traitées par un ingénieur data qui les structure, les analyse, et les archive. Elles sont également cartographiées. Elles peuvent ainsi être utilisées pour améliorer l’expertise sur les maladies, sur les stratégies de traitements, les produits, les programmes.

 

 

 

La recherche sur la lutte contre le Mildiou

 

L’enjeu est de valoriser ces données pour répondre aux questions des scientifiques, aux problématiques des clients viticulteurs, d’en faire des données utiles et économiquement motivées. La fiabilité d’un système comme le VigieLab repose autant sur la qualité des observations que sur leur structuration. Les bases de données sont donc interconnectées, les formats standardisés afin de pouvoir être traitées par des outils d’analyse avancés, et ainsi garantir des résultats exploitables en temps réel.

 

L’entreprise a déjà pu initier des programmes de recherche notamment sur le mildiou. Les données ont été expertisées et les procédures validées pour être utilisées pour des analyses complexes, sans trop de retraitement. Plusieurs travaux de recherches sont ainsi en cours avec des étudiants, en AgroTIC de Bordeaux Science Agro, et en stage de master de mathématique des Universités de Bordeaux et Poitiers. De nouvelles collaborations sont prévues avec des équipes d’épidémiologie et d’analyse de données en IA.

 

 

 

Des premiers résultats

 

Les travaux du VigieLab ont apporté des réponses intéressantes et statistiquement robustes. Sur le mildiou, il a été démontré des différences de sensibilité entre les principaux cépages du Bordelais, qui contredisent des affirmations empiriques mal documentées. Ainsi le Merlot n’est pas plus sensible sur feuilles, et sa sensibilité sur grappes est plus prononcée que les autres cépages, mais uniquement à partir des stades moyens BBCG 73 ou 75.

 

De même, en 2024, Le Vigielab a démontré que les détections précoces de dégâts sur feuilles étaient très fortement corrélées à des détections précoces de mildiou sur grappes. Concernant l’efficacité des stratégies de traitements, le Vigielab a démontré que, en Bio, en 2023, le paramètre réduction des cadences en dessous de 5 jours était plus efficace, que les doses appliquées, ou que le renouvellement en fonction de la pluie. Des publications sur ces sujets sont prévues dans les prochains mois.

 

 

 

Phloème

 

Phloème, c’est une équipe de 11 personnes, dont 8 ingénieurs et techniciens formés et étalonnés, et des fonctions supports et environnement, qui ont investi ensemble dans toute une série d’outils. Ils vont sur le terrain avant tout pour conseiller les viticulteurs, mais en profitent pour réaliser des observations utilisables par la suite pour l’analyse de donnée.

Phloème Conseil

 

Vinitiques

 

Les Vinitiques sont nées d’une volonté commune du Pôle Digital Aquitaine (fin décembre 2024, Digital Aquitaine a fusionné dans le pôle ENTER, qui traitera à l’avenir ces sujets), du Cluster Inno’vin et des technopoles Bordeaux Montesquieu et Unitec, d’inventer un lieu convivial et propice aux rencontres et aux échanges d’informations entre les filières du vitivinicole et des technologies numériques, électroniques et informatiques. Lancé en 2012, l’événement Les Vinitiques est un rendez-vous bi-annuel à destination des professionnels.

vinitiques.com

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