Accueil / Portraits d’acteurs / Portrait d’acteur : Christian Gourgourio
Originaire de Haute-Savoie, Christian Gourgourio s’installe à Bordeaux pour étudier et pour ne plus en partir ! Diplôme d’ingénieur agricole en poche, il débute sa carrière comme conseiller viticole au sein de la cave coopérative de Sauveterre de Guyenne puis des Vignerons de Tutiac. En 2009, il se forme à l’agriculture bio et à la biodynamie pour pouvoir accompagner les dix premiers vignerons de la coopérative dans la conversion de leurs vignobles. Il gère également le centre de formation de la cave à ces pratiques viticoles.
En 2015, Christian Gourgourio reprend 3,5 ha de vignes en fermage à un vigneron de Tutiac. « La vigne est mon ADN. » C’est pourquoi, initialement, il pense se consacrer uniquement à la partie viticole. Finalement, il se lance totalement dans l’aventure et conduit aussi les vinifications. En parallèle, il continue de conseiller des vignerons dans la transition de leur propriété, une activité qu’il développe à l’origine avec Albane Bervas, rencontrée au sein de l’association Agro Bio Gironde. Désormais, c’est au sein de la corporation des Architectes du vivant, initiée par Marceau Bourdarias qu’il développe une vision de la plante bien différente notamment dans l’approche de la taille.
Rebaptisées Clos du Mounat, ses parcelles sont situées en Côte de Bourg. En 2017, viennent s’ajouter 5 ha en Blayes Côtes de Bordeaux avec l’acquisition de La Métairie de Monconseil. La reprise de terres en fermage par la suite porte l’ensemble de son vignoble à 10 ha équitablement répartis entre Blaye et Bourg.
« La culture de la vigne, ça reste la base. » Même si les parcelles reprises étaient en bio depuis longtemps, les sols étaient encore largement travaillés, avec décavaillonnage et passage de rotavator. « Dès le départ, je me suis attaché à remettre les sols en bon fonctionnement avec l’idée de reconstituer les horizons et limiter au maximum les perturbations. » Les trois premières années, le néo-vigneron arrête le travail des sols, effectue des semis de céréales et de légumineuses pour relancer la vie des sols et parvenir à un enherbement naturel.
« Et, puis au départ, ça m’arrangeait de laisser les sols tranquilles, puisque je n’avais aucun matériel ! » se souvient-il amusé. « La banque ne prête pas tant qu’on n’a pas récolté… donc la première année, j’ai travaillé avec le matériel que des vignerons amis ont bien voulu me prêter. » Depuis, c’est toujours ainsi qu’il travaille. Au plus près de ses vignes sans rogner du fait du fort dévers qui rend l’opération plus que périlleuse.
« Pas fan de bois », Christian Gourgourio vinifie avec des levures indigènes, principalement en cuve ou en amphore. Seul son vin rouge traditionnel, La Tresse du Clos du Mounat est élevé douze mois en barrique. Pour cette cuvée, comme pour les autres, il privilégie les levures indigènes et travaille sans intrants. Ses deux autres vins rouges, Sans pour Sens (Clos du Mounat) et Le Bateau Ivre (La Métairie de Monconseil) sont élevés en cuve.
Sous le nom de Pot de Terre, au Clos du Mounat, le vigneron façonne en amphore deux cuvées, en rouge et en blanc. À l’instar des vins orange, ce blanc de macération issu d’une parcelle de 35 ares, est assez atypique. Très axé sur la minéralité, son millésime 2021 est proche d’un chenin de Loire sans que ne perce la typicité du sauvignon qui le compose. La cuvée 2022 fait la part belle au fruit de la passion et présente des amertumes intéressantes ainsi qu’une structure tannique qui en fait un blanc de garde.
Depuis 2021, le vigneron s’est lancé dans la plantation de 500 arbres. Ses 5 hectares de vignoble portent désormais 300 fruitiers (pommiers, poiriers, pruniers, pêchers, cerisiers et amandiers) mais aussi 200 chênes truffiers. « Un pari plus audacieux, la cohabitation entre les mycorhizes de la vigne et celui du truffier n’étant pas toujours fructueuse et pouvant parfois se nuire… donc, on verra le résultat dans quelques temps. »
Pour tenter de faire évoluer l’image des vins de Bordeaux et parce que leurs pratiques sortent « des sentiers battus », il a rejoint dès leur création les vignerons de Bordeaux Pirate. Et, parce qu’il croit en tant que vigneron et conseiller que l’agroécologie (sol couvert et agroforesterie) est une voie à ne pas négliger pour l’avenir de l’agriculture, il travaille avec l’association Carbouey pour promouvoir et développer cette vision de l’agriculture en participant et en animant des journées techniques dans le vignoble bordelais. L’association est à l’origine du Sommet Agroécologie Bordeaux qui aura lieu le 14 novembre prochain à Bordeaux.
Dans le contexte de crise que connaît actuellement le secteur viticole, Christian Gourgourio trouve dommage que l’on en vienne à arracher des vignes pour les remplacer par une autre monoculture sans tenter de développer des zones de coproduction. « Les vignes pourraient être conservées et l’inter-rang exploité avec par exemple une céréale que l’on pourrait récolter. » À l’avenir, il aimerait continuer à faire évoluer ses pratiques de co-culture et aller jusqu’au bout de la transformation en procédant, pourquoi pas, à la distillation des fruits des arbres de son vignoble…
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