Accueil / Portraits d’acteurs / Portrait d’acteur : Pascal Amoreau
En 1996, Pascal Amoreau rejoint le Puy. A 28 ans, il s’inscrit dans le sillon de ses ancêtres, ancrés sur ces terres depuis quatre siècles. Auparavant, comme le veut la tradition familiale, il a fait ses armes ailleurs. Occupant « à peu près tous les postes, de chauffeur livreur à commercial », il se forge une vision de l’entreprise et acquiert « un peu d’expérience et de sagesse. »
Bien que disposant « de l’auto-formation propre aux enfants de vignerons, » ce représentant de la 14e génération, débute au bas de l’échelle, c’est-à-dire les pieds et les mains dans la terre, « là où réside le cœur du métier ». Porté par l’exemple de parents passionnés, il éprouve le sentiment d’avoir toujours su qu’un jour il rejoindrait le Puy sans en avoir eu tout de suite conscience
Situé sur les hauteurs du plateau rocheux de Saint-Emilion, le Puy dispose d’un vignoble « béni des dieux » occupant le point culminant du Coteau des Merveilles. Épaulés par les représentants de la 15e génération, Pascal Amoreau et son père veillent aujourd’hui sur ce terroir argilo-calcaire particulièrement propice à la vigne et au vin avec la volonté de lui permettre d’exister quelques siècles encore.
Fruit d’une histoire quatre fois centenaire nourrie de multiples transmissions, innovations et transformations, le Puy est au XVIIe siècle une ferme vivant en autarcie et produisant entre autres denrées du vin. Il faut attendre la crise du phylloxéra pour voir l’exploitation passer à une économie unique fondée sur la vigne.
Au XXe et XXIe siècle, le vignoble s’étend. Résistant aux pratiques culturales initiées au milieu du siècle dernier, l’exploitation est conduite sans le moindre recours aux intrants. Ses terres grasses et épaisses tout à la fois « idéales pour la vigne et dures au vigneron », n’ont jamais connu la chimie. « Mon grand-père s’y est toujours refusé pour des raisons plutôt économiques, et mon père, militant de l’agriculture dite traditionnelle de la première heure, pour des raisons idéologiques. »
Ici, on ne fait rien comme ailleurs et les vinifications ne dérogent pas à la règle. Elles sont conduites par infusion en chapeaux immergés, une technique unique, initiée « par mon grand-père, il y a plus de de 40 ans » et qui permet d’extraire les tannins sans violence. Elle donne des vins plus ronds, plus agréables à boire tôt, mais contenant des tannins qui se prolongent au moins aussi longtemps voire plus que ceux des autres vins.
Au chai, le travail s’effectue sans ajout. « Pas plus de levure que d’enzyme, juste de l’amour pour proposer des vins de plaisir qui donnent envie de se resservir un verre. » Puisque décidément rien n’est fait comme ailleurs, pour une des cuvées hommage à un ancêtre amoureux des flots, quatre barriques embarquent chaque année pour un élevage transatlantique sur un vieux gréement
« L’ennemi du bio, c’est la monoculture ! », un principe bien compris sur le domaine où les vignes se mêlent aux bois, aux taillis, aux prés et aux étangs. La nature est reine depuis toujours et tout est mis en œuvre pour favoriser la présence d’insectes, d’animaux et entretenir la diversité d’un écosystème à l’équilibre le plus naturel possible.
Autre particularité familiale, une certaine volonté et capacité d’anticipation. Pour ne pas subir, « on essaie de sentir et de faire avant les autres, en espérant ne pas nous tromper… ». Cela se traduit par des essais de culture en palissages, de même que la plantation de cépages différents.
Pour rester des « hommes libres et nous préparer aux changements à venir nous avons dû sortir de l’AOC » avec l’implantation de pieds de castets et de pardotte. Le Puy dispose aussi d’une parcelle expérimentale portant plus de 30 cépages différents : grenache noir, pinot blanc, roussanne, gamay… Des essais qui ont permis d’aboutir cette année à la création d’une parcelle entière de chenin, chardonnay et sémillon destinée à la vinification.
« Le défi de demain, c’est le climat, » conclut Pascal Amoreau, « on cherche à y répondre avec l’implantation de cépages différents, la culture en pergola, de même qu’en poursuivant nos recherches et nos essais. Car nous ne parviendrons pas à fêter nos 800 ans sans nous retrousser les manches pour continuer d’avancer ! »
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