Les mots de Mac Mahon étaient sur toutes les lèvres, lorsqu’on osait quémander une impression globale concernant 2024, suivis de près par l’évocation triste du champignon cryptogamique.
Pourtant, au sortir de cette séquence primeurs marquée par une inquiétude générale où l’on semblait déjà se préparer au pire (presque par anticipation), on se surprend à disserter sur les réussites d’un drôle de millésime qui appela disruption et doigté pour être dompté. On nous a répété à l’envi que ce millésime avec des faibles degrés d’alcool réclamait que les jus soient choyés, les boisés peu appuyés, les tanins mûrs, et que l’on accepte une touche infime de végétal — la pyrazine souvent tolérée par les adorateurs du Cabernet franc ligérien. Dans le pire des cas, les prises de bois massives, les acidités fort présentes alliées à des tanins grossiers ont dénaturé les vins.
Les bonnes copies rendues renvoyaient plus aux croquis sur l’os d’un jeune Rembrandt qu’à l’opulence d’un Botticelli. Une forme d’ascèse qui n’hypothèquerait en rien, soit dit en passant, la capacité de garde de quelques vins rencontrés. On nous a également répété à loisir qu’il fallait avoir respecté son terroir, sa capacité à livrer des raisins sains et aussi mûrs que le permettait ce millésime. On note que les terroirs d’argile ont globalement mieux encaissé les conditions climatiques du 2024, avec des Cabernets ramassés après le 5 octobre qui ont pu profiter de belles fenêtres d’ensoleillement. Le mildiou « total » a obligé à des tris soignés.
L’équipe de Derenoncourt Vignerons Consultants a rappelé que « la maîtrise de l’état sanitaire a souvent guidé la décision de récolte, l’étape cruciale d’un tri méticuleux des raisins harmonise la qualité de la vendange à l’entrée du chai. Cette précision a permis de réduire les sensations végétales et de profiter de la belle maturité des pépins ». Les blancs secs et les liquoreux s’avèrent d’une fraîcheur étonnante, à condition d’avoir su gérer l’équilibre acide. Comme l’ont encore souligné les techniciens de Derenoncourt Vignerons Consultants « les blancs ont profité de belles conditions de maturation. Ils offrent des nez explosifs, une maturité aboutie, révélant une palette aromatique généreuse et diversifiée. ».
Au global, on a dégusté des vins rouges expressifs et avenants, dominés par des arômes de fruits frais, des nuances florales et des épices délicates. Dans la plupart des cas, on a pu rencontrer des trames tanniques sveltes et plutôt étirées. En somme, il fallait avoir dégusté avant que de commenter et bien souvent d’enterrer un millésime tout en fraîcheur incisive. Transformons-nous en Sisyphe et clamons à chaque fois qu’il le faudra qu’il s’agit d’un millésime de fraîcheur océanique et de reconquête.
L’équipe Vintaste avait présélectionné des vins blancs issus de la région bordelaise, disponibles à un prix public inférieur à 15 €. Une dégustation à l’aveugle a permis de définir 3 coups de cœur qui ont surpris par leur qualité, et par leur rapport qualité-prix !
Belle robe lumineuse, rose pâle. Nez expressif, qui se révèle à l’agitation, notes de fruits rouges, parfum frais d’herbes aromatiques et de fruits blancs. En bouche, souplesse et fraîcheur s’équilibrent avec des notes minérales et une bonne longueur.
Note : 92/100
Association : Petits farcis niçois ou tajine d’agneau aux abricot et aux citrons confits.
Distribution : Vente Directe, Caviste et CHR.
Prix départ cave : 12 € TTC
Vignobles Baylet– Tél : 05 56 30 64 28 – vignoblesbaylet@free.fr
Jolie robe brillante, très pâle. Nez très expressif et frais, aux notes fraises et framboises. Touche citronnée, plus complexe après agitation. La bouche est gourmande, fraiche et délicate, on y retrouve le caractère fruité avec une finale longue et saline. Un rosé d’apéritif à siroter en été au coucher de soleil.
Note : 91/100
Association : Tapas de la mer, carpaccio de noix de saint jacques ou Mousse à la framboise.
Distribution : Vente Directe, Caviste et CHR et GMS.
Prix départ cave : 5,70 € TTC
Château La Verrière – Tél : 05 56 61 39 56 – alainbessette@orange.fr
Robe rose très pâle, presque blanche. Nez élégant, frais avec des arômes floraux soutenu par une jolie minéralité. La bouche est ample, ronde avec du volume, avec une certaine onctuosité. Une belle longueur en bouche et des notes fraises framboises qui se développement à l’aération. Un rosé de repas.
Note : 90/100
Association : Calamards grillé à la citronnelle.
Distribution : Vente directe à la propriété.
Prix départ cave : 9,5 € TTC
Domaines Rollan de By – Tél : 05 56 41 58 59 – infos@rollandeby.com
Le Jury Vintaste est constitué de professionnels du vin : oenologues, journalistes, cavistes, acheteurs…
Pour cette dégustation ont participé parmi les membres de l’équipe Bernard Sirot (Vigneron et Journaliste), Marie-Laurence Porte (Oenologue Enosens), Denis Barse (Marchand de Vin), Mathieu Anglada (Presse), Frédéric Fleuri (Presse), Xavier leclerc et Pascal Hénot (Oenologue Enosens). Photos (c) JB Nadeau.
Restaurant La Maison du Fleuve
Cette dégustation a pu se réaliser dans des conditions optimales grâce à la complicité de Pascal Chollet et de son épouse, propriétaires de cette magnifique adresse dans un cadre à couper le souffle. La mise à disposition du salon privé nous a permis de travailler dans des conditions parfaites, avant de passer à table…
Plus d’infos
Une partie de l’équipe de dégustation – 22 avril 2025 – Restaurant La Maison du Fleuve. Photo (c) Xavier leclerc.
Les annonces tarifaires commencent, pour ceux qui ont encore l’espérance et la chance d’être vendus en Primeurs. Objectivement, ce ne fut pas la grande foule cette année. Le mécanisme des Primeurs est en panne et Bordeaux n’est plus à la fête. Mis à part quelques spécialistes patentés, 2024 ne marque pas les esprits par sa qualité mais…
Il représente néanmoins ce que recherche aujourd’hui nombre de consommateurs. Du fruit, moins de tanins et d’alcool et une consommation plus rapide. Tout réside désormais dans les prix proposés. Mieux vaut se couper un doigt que le bras…
« Sacrifier le millésime » serait pour beaucoup une stratégie qui permettrait à tous les acteurs de la filière d’enfin tirer dans le même sens. Et ainsi relancer pour l’avenir un système habile et bluffant qui a réussi à Bordeaux depuis longtemps.
Mais à Bordeaux, l’union ne fait pas nécessairement la force, et de plus, les premiers prix annoncés ne répondent pas nécessairement aux attentes. Il fut un temps où près de 1000 propriétés vendaient en Primeurs, sont-elles encore 50 aujourd’hui ? Beaucoup d’acheteurs attendent des baisses d’au minimum 30% alors que le millésime 2023, déjà la baisse, n’a pas connu le succès espéré. Cette attente se limite bien entendu aux grands Vins dont doit venir le bon exemple. La grande majorité des producteurs ne pouvant se permettre une baisse de prix aussi significative, bien entendu.
Cependant, certains producteurs vendant en direct, ne connaissent que peu la crise mais craignent plus que tout une baisse de prix catastrophique chez leurs voisins qui ne feraient que tirer vers le bas toute la hiérarchie des vins de Bordeaux. Et ne parlons pas d’opérations suicides et catastrophiques qui vont se multiplier dans la grande distribution où des Bordeaux à moins de 2 € sont désormais mis en marché. Vendre à prix coutant est aujourd’hui une réalité pour beaucoup. En n’oubliant pas que les prix des matières sèches ont augmenté et que trouver du personnel s’apparente à une véritable chasse aux trésors…
Il faut bien l’avouer, les vins de Bordeaux ne correspondent plus aujourd’hui aux exigences et demandes de certains consommateurs. Alors qu’ils n’ont jamais été aussi bons et qu’une fourchette de prix unique permet à chacun de trouver son bonheur. C’est extrêmement frustrant et problématique pour tous. Il est loin le temps où les producteurs réunis sous leur bannière d’appellation se déplaçaient quasi chaque année en masse sur Bruxelles, Amsterdam, Londres et autres capitales d’Europe pour présenter leurs productions aux distributeurs, cavistes, sommeliers et parfois consommateurs. Ces opérations de proximité ne sont-elles pas à relancer au plus vite si on veut « Sauver le Soldat Bordeaux… » ? Mais les producteurs en ont-ils encore l’envie ?
Les Français boivent deux fois moins de vins qu’il y a cinquante ans. Heureusement le tourisme continue d’engendrer de bons chiffres et les étrangers sont très friands de vins français et d’achats en propriétés. Cette baisse de consommation est catastrophique et pas plus tard qu’hier, mardi dans un restaurant brasserie de premier ordre à Langon, il n’y avait du vin au verre que sur deux tables. Pas une bouteille ni d’autres verres de vin en vue sur les onze tables voisines. Comment s’en sortir avec un désaveu aussi flagrant… Auparavant les restaurateurs faisaient leur marge avec la bouteille de vin. Aujourd’hui, c’est fini. Pas étonnant donc que les dépôts de bilan soient extrêmement nombreux. Plus de 7000 enseignes en 2024. Cependant de nombreuses ouvertures existent aussi, avec des approches novatrices.
Le vin au verre est tout à la fois une aubaine, mais aussi dans certains cas, heureusement peu nombreux, une tromperie honteuse. Je ne peux que vous conseiller de vous faire servir le vin au verre sur table, bouteilles proposées à votre connaissance. De nombreuses transformations d’AOC se produisent parfois dans certains établissements pourtant résumés sérieux. J’ai toujours en mémoire la commande d’un verre de Sauternes qui, au moment du règlement au comptoir, s’est révélé être un vin de Cadillac provenant d’un cubitainer. Bonjour l’arnaque ! Ce « mirage « n’est hélas pas rare et demande de la vigilance de la part du client.
Heureusement le bon temps actuel préfigure une bonne étape végétative. Et un tourisme prospère fort attendu. Espérons aussi qu’il soit le signe de la relance pour une filière à bout de souffle…
Bernard Sirot
Journaliste et dégustateur Vintaste
Photo (c) Jean-Bernard Nadeau
Entre changement climatique, pression accrue pour une réduction des intrants phytosanitaires et contexte économique difficile, la protection de la vigne contre les maladies devient un casse-tête pour de nombreux vignerons et un enjeu majeur pour la filière vitivinicole. Les millésimes récents — comme 2023 et 2024, ont montré une pression exceptionnelle du mildiou qui a pesé, parfois très fortement, sur les rendements des exploitations et, in fine, sur leur rentabilité. D
De nombreux outils numériques sont disponibles pour accompagner les viticulteurs dans la détermination et la mise en œuvre de leur stratégie de protection phytosanitaires et de nouvelles solutions apparaissent régulièrement. Aujourd’hui, un nouveau cap pourrait être franchi grâce aux progrès de l’intelligence artificielle, à la mobilisation de l’open data et aux nouvelles connaissances agronomiques.
Mais concrètement, où en est-on aujourd’hui ? Ces technologies peuvent-elles réellement changer la donne dans la lutte contre le mildiou ?
Autant de questions que cette nouvelle édition des Vinitiques propose d’explorer à travers des retours d’expérience, l’éclairage d’experts et la découverte de solutions innovantes.
Vinitiques
Les Vinitiques sont nées d’une volonté commune du Pôle Digital Aquitaine, du Cluster Inno’vin et des technopoles Bordeaux Montesquieu et Bordeaux Unitec, d’inventer un lieu convivial et propice aux rencontres et aux échanges d’informations entre les filières du vitivinicole et des technologies numériques, électroniques et informatiques. Lancé en 2012, l’événement Les Vinitiques est un rendez-vous bi-annuel à destination des professionnels.
www.vinitiques.com
Infirmière de formation, Caroline Perromat voit son parcours professionnel prendre un tournant décisif après avoir eu quatre enfants. Elle décide alors de reprendre ses études et obtient un BTS viti-œnologie à Montagne-Saint-Émilion. Son chemin la mène rapidement au Château Haut-Bailly, prestigieux domaine qui marquera profondément sa carrière.
« À 30 ans j’arrive à Haut Bailly. Cette propriété a été ma belle étoile ! » confie-t-elle. Durant quinze années qu’elle qualifie de merveilleuses, Caroline Perromat enrichit sa réflexion sur le vignoble moderne, l’histoire ancienne et l’aspect culturel du vin. Cette période est d’autant plus formatrice qu’elle a la chance de côtoyer régulièrement des figures emblématiques du monde viticole comme le professeur Pascal Ribéreau-Gayon et l’œnologue Denis Dubourdieu lors de séances de dégustation.
À Haut-Bailly, elle contribue à la constitution d’une équipe solide et participe aux premiers pas de l’œnotourisme à Bordeaux. Dès 2009-2010, elle développe l’organisation de week-ends et l’ouverture d’une boutique, faisant du domaine un véritable pionnier dans ce domaine. Cette innovation est d’ailleurs récompensée dès la première année par le Best of D’or de la CCI de Bordeaux, soulignant l’importance de cette filière naissante au sein du secteur vitivinicole.
C’est également durant cette période que Caroline Perromat participe à une initiative qu’elle qualifie de « d’assez géniale et bien pensée ». En collaboration avec l’office du tourisme, la CCIB et le CIVB, elle contribue à la création d’un bus destiné aux étudiants bordelais venus de tous horizons. L’objectif était clair : leur faire découvrir les vignobles et les transformer en ambassadeurs potentiels des vins de Bordeaux.
Ainsi sont nés les BOBB (Best of Bordeaux Bus), qui chaque samedi conduisaient les étudiants volontaires à la découverte de deux propriétés ayant reçu un Best Of Wine Tourism. Ces sorties étaient systématiquement précédées d’une présentation à l’école du vin. Une initiative qui résonne particulièrement aujourd’hui, alors que Bordeaux s’interroge sur le rapport à l’alcool et aux vins des jeunes adultes.
Un nouveau chapitre s’ouvre pour Caroline Perromat en 2012 lorsqu’elle quitte Haut-Bailly. Ses beaux-parents mettent en vente la propriété sur laquelle son mari Xavier travaille depuis vingt ans. Ensemble, ils font le choix audacieux de se porter acquéreurs de 30 hectares des Graves de cette propriété. « On s’est retroussé les manches, car tout était à faire ! » se souvient-elle.
Dès le début, le couple engage le domaine dans une transition écologique. Les jeunes vignes replantées le sont en bio et à partir de 2021, le Château de Cérons entre officiellement en conversion. Des travaux d’envergure sont réalisés tant à la vigne qu’au chai gravitaire sous la direction de Xavier, tandis que Caroline se concentre sur la partie commerciale, transformant un domaine qui vendait 100% de sa production en vrac à une commercialisation en bouteilles.
Accompagnés par Julien Belle du cabinet OenoTeam, ils façonnent leurs vins et développent les gammes qui composent aujourd’hui l’offre du domaine. Leur ambition ? Faire rayonner Cérons, la plus petite des appellations de vins liquoreux de Bordeaux. « Nous en sommes les ‘gardiens’ du temple et, il nous appartient de mettre en valeur cette appellation qui constitue un véritable bijou. »
Après plus de dix ans de restructuration, le vignoble présente aujourd’hui des cépages soigneusement sélectionnés pour produire des Graves blancs secs, des Graves rouges et des liquoreux de Cérons. Avec une densité de 6500 pieds par hectare, le Château de Cérons perpétue une viticulture raisonnée et respectueuse de son terroir.
Caroline Perromat s’est fixé un nouveau défi : faire revivre la Chartreuse du 17e-18e siècle qui trône au cœur du domaine. Pour que les visiteurs puissent s’immerger dans cette appellation confidentielle, elle lance en juin 2024 d’importants travaux de restauration de cet édifice remarquable. Parallèlement, elle développe une offre œnotouristique complète ancrée dans ce site d’exception, une initiative qui lui vaut de remporter le Best of d’Or 2025 dans cette catégorie.
Baptisée » Voyage de Cérons », la découverte du domaine s’inscrit dans un programme œnotouristique complet. Les visiteurs sont invités à parcourir les vignes autour de la Chartreuse, à découvrir les parcelles renaturées où ont été plantés 750 arbres fruitiers, ainsi que des arbustes, des céréales, des fleurs et des légumineuses utilisés pour les couverts végétaux. Ce parcours reprend le chemin historique des pierres de la carrière de Cérons et des vins qui quittaient autrefois le domaine en gabare pour rejoindre Bordeaux.
Comme jadis, les visiteurs empruntent ce sentier à travers deux tunnels de pierre : le premier mène des parcelles aux puits de biodiversité, le second conduit à un champ de tournesols qui s’ouvre sur un carrelet au bord de la Garonne, avant de se terminer devant l’église du XIIe siècle qui fait face à la Chartreuse. Un parcours à la fois géologique, botanique, célébrant les beautés de la nature et du patrimoine architectural. « Une promenade fleurie, fruitée et joyeuse », résume son initiatrice.
Caroline Perromat qui se décrit comme une « grand-mère moderne de 55 ans » menant de front son activité très prenante au domaine avec neuf salariés, ses engagements dans divers organismes dont les syndicats viticoles, tout récemment au sein du bureau de la Fédération Vignobles et Découvertes, sans négliger son rôle auprès de ses petits-enfants, une femme engagée, passionnée et résolument tournée vers l’avenir.
L’association Expression de Fronsac vous propose de venir rencontrer leurs vins et célébrer le goût, les savoir-faire et les personnalités qui font la richesse de ce terroir ; une immersion chaleureuse où les vins rencontreront les produits emblématiques des artisans et producteurs locaux.
Événement réservé aux professionnels – Uniquement sur inscription préalable.
10:00 – Dégustation des cuvées remarquables d’Expression de Fronsac (livrables & primeurs 2024)
12:30 – Festin autour d’une sélection de produits du terroir
📍Château de la Rivière, 33126 La Rivière
L’événement annuel des Primeurs, tant attendu par la filière, s’est déroulé dans une ambiance conviviale et chaleureuse, malgré une certaine gravité liée au contexte économique très difficile pour le secteur viticole. Ainsi, nos échanges en tant que professionnels ont porté autant sur la qualité du millésime que sur les perspectives commerciales et l’avenir du vignoble bordelais.
Le nombre de visiteurs était inférieur à celui des années précédentes, cependant, l’essentiel réside dans la présence active des vignerons pour cet événement. La présentation des primeurs est un moment stratégique qui leur permet de présenter ce nouveau millésime, saisir l’opportunité d’établir des contacts commerciaux ou de recueillir des notes de dégustation pour booster leurs ventes.
Cette année encore, certains événements ont été ouverts au public, ce que je trouve être une excellente initiative. Cela permet aux amateurs intéressés par les appellations bordelaises de découvrir cette formule des primeurs, tout en ayant la possibilité de déguster des vins livrables et d’échanger directement avec les producteurs.
Ce millésime ne présageait pas une récolte quantitative à cause du mildiou et de la coulure/millerandage. On pouvait avoir de sérieux doute sur la qualité finale avec les conditions pluvieuses et fraiches, le manque de chaleur et de lumière sur une grande partie du cycle végétatif, mais également les vendanges précipitées à cause du Botrytis. Finalement, le millésime 2024 est une belle surprise et les propriétés ayant pu adopter des stratégies viticoles et vinicoles rigoureuses ont su tirer leur épingle du jeu. Les vins, encore en cours d’élevage, se distinguent par leur fraîcheur, leur précision aromatique et des niveaux d’alcool modérés.
2024 est avant tout un millésime de blancs. La récolte s’est déroulée dans des conditions optimales de températures ce qui a limité les phénomènes d’oxydation et a préservé tout le potentiel aromatique. Les blancs sont particulièrement réussis avec une grande pureté, une belle expression aromatique et des bouches caractérisées par leur fraicheur mais tout en rondeur. Certains lots marqués par l’acidité ont nécessité du travail pour donner de la matière en milieu de bouche. Le choix de l’élevage sur lies avec des bâtonnages a permis de tempérer l’acidité en apportant volume et longueur et ainsi rattraper ce déséquilibre.
Les sauvignons expriment agrumes, notes de pêches et d’exotiques avec une bonne capacité de garde grâce à une acidité qui leur confère tension et longueur. Les sémillons sont souples, frais, voire ample pour les plus réussis. En assemblage les vins présentent complexité, ampleur et gras en bouche avec une tension tout en équilibre et une finale parfois saline. Certains blancs sont encore en élevage sous-bois, et grâce à l’acidité du millésime, l’intégration du boisé est pour l’instant très réussie, élégant et fin.
Dès le début des vendanges, les conditions sont propices à l’apparition de la pourriture noble. Sur les sémillions et comme pour les blancs secs, les liquoreux en sud gironde présentent une fraicheur incomparable qui rend les bouches acidulées mais équilibrées. La liqueur cette année est plus modérée que les deux derniers millésimes. Sur les secondes tries, bien que la richesse en sucre puisse atteindre de bons niveaux (généralement jusqu’à 20 % vol sur la rive gauche, contre moins de 17 % vol sur la rive droite), la perception de la liqueur en bouche dans l’équilibre reste atténuée en raison de l’acidité prononcée du millésime.
Ce millésime 2024 est un millésime de pourriture noble, sans passerillage, où les vins sont fruités, complexes, présentant des arômes d’agrumes confits et de fruits exotiques. Les bouches sont fraîches tout en équilibre avec la liqueur, avec un potentiel de garde prometteur.
L’évolution lente de la maturité et la fraicheur tout le long du cycle de la plante ont favorisé des vins fruités, colorés avec une très bonne buvabilité d’ensemble et un degré alcoolique modéré. La structure tannique est fine, avec des lots plus ou moins concentrés selon les terroirs. Les terroirs trop humides, sur lesquels la vigne est vigoureuse, où les raisins ont mûri difficilement, les arômes restent discrets, frais et les bouches sont souples voire simples. A l’inverse, les meilleurs terroirs ont favorisé le fruit, la rondeur et l’équilibre.
Au vignoble, l’effeuillage a été un choix qualitatif risqué mais payant, tout comme le choix des dates de vendanges, essentiel pour trouver un compromis entre la maturité des grappes souvent hétérogènes sur un même pied et l’état sanitaire. Le tri et le nettoyage des raisins et des jus ont permis d’obtenir des profils nets malgré la présence de Botrytis. En cave, les choix d’extraction ont été cruciaux, et la bonne gestion des presses, très qualitatives cette année, a permis leur revalorisation dans les lots principaux pour renforcer la densité des bouches.
L’élevage, notamment le bâtonnage des lies, a apporté volume et sucrosité sur les lots déséquilibrés. La proportion de barriques neuves, la chauffe et la durée de l’élevage vont aussi influencer le résultat final, visant à équilibrer les bouches en apportant densité, structure tout en préservant le fruité.
Ainsi, les choix opérés au vignoble et au chai, combinés à l’effet terroir ont permis de produire dans l’ensemble des merlots qui présentent de bonnes couleurs aux teintes violacées, des arômes de petites baies dominent, souvent le cassis et parfois la cerise rouge avec des bouches souples, gourmandes avec de la sucrosité, rondes et fraiches. Les Cabernets francs sont souvent moins concentrés mais très aromatiques, avec un profil floral, et frais. Les Cabernets sauvignons, autre surprise du millésime pour ce cépage tardif. Les couleurs sont soutenues, les arômes mêlent petits fruits noirs et parfois des notes d’épices et de menthol, avec des bouches plus ou moins denses et structurées mais aux tanins fins et une certaine sucrosité.
Au final une belle complémentarité pour ces cépages gage d’assemblages qui permettront à la fois d’élaborer des vins d’élevage et d’autres plus friands pour une consommation plus rapide où ces derniers répondent finalement aux attentes d’un grand nombre de consommateurs..
L’association les Chantiers Tramasset organise la 6ème édition de cet événement oenotouristique dont l’objectif est de faire le lien entre le patrimoine fluvial et le patrimoine viticole dans un lieu historique ; un espace de rencontre et de découverte gustative, artistique et festive, ancré dans une démarche respectueuse de l’environnement. Cette année, l’événement est co-organisé en partenariat avec L’Appétit du Vin et Sain Bio Ose.
Une quinzaine de vignerons de Gironde viendront présenter leur production en bio, biodynamie et démarche naturelle, sous la grande halle du chantier naval associatif. Le public pourra aussi s’initier et expérimenter la peinture au vin lors d’un atelier avec l’artiste plasticienne Nau’ (sur inscription à l’accueil). La soirée sera animée par un concert.
• 14h-19h : Salon découverte & dégustation. Deux ateliers de peinture au vin avec l’artiste Nau’
• 19h : Table d’idées autour des enjeux du vin
• 20h : Concert – The Smart Habas
Depuis 1997, l’association Les Chantiers Tramasset œuvre à la préservation et à la valorisation de ce lieu historique, inscrit à l’inventaire des monuments historiques depuis 2008. Datant de 1837, ce site, composé de deux chantiers et d’une étuve, est le dernier témoignage vivant d’une époque où la batellerie et le fret fluvial structuraient l’économie girondine. Dans cet écrin chargé d’histoire, Les Belles Goulées célèbre le vin sous toutes ses formes et propose une expérience immersive où patrimoine, terroir et création artistique se rencontrent.
L’équipe Vintaste avait présélectionné des vins blancs issus de la région bordelaise, disponibles à un prix public inférieur à 15 €. Une dégustation à l’aveugle a permis de définir 3 coups de cœur qui ont surpris par leur qualité, et par leur rapport qualité-prix !
Robe jaune paille . Le nez d’une belle fraîcheur exprime la typicité d’un sauvignon récolté à la juste maturité : herbes aromatiques, notes de coriandre, de menthe, avec une touche de fruits tropicaux, le tout soutenu par un boisé bien intégré (réglisse, vanille). En bouche, l’attaque est ample et une discrète présence tannique apporte de la densité et une bonne longueur. Les notes boisées participent à la structure du vin. On retrouve des notes de citrons confits en fin de bouche.
Note : 93/100
Association : Ris de veau aux champignons frais – Gratin de noix de saint jacques sur un lit de poireaux.
Distribution : Vente Directe, Caviste, CHR, Export et GMS.
Prix départ cave : 6,20 € TTC
Château La Verrière – Tél : 05 56 61 39 56 – alainbessette@orange.fr
Robe pâle et brillante révélant des arômes frais de fruits blanc et d’agrumes. Le boisé est discret, plutôt sur des notes amandées et vanillées. La bouche est bien équilibrée, délicate et enrobée, toute en finesse. Le boisé est discret plutôt sur des notes vanillées. La structure convient bien pour un repas. Bonne longueur qui finit sur des notes abricotées.
Note : 91/100
Association : Pâté croute de Bourgogne – Ragout d’agneau aux abricots et aux figues.
Distribution : Vente directe, Cavistes et Export.
Prix départ cave : 8 € TTC
Château Saincrit – Tél : 06 07 16 47 53 –
Sa belle robe brillante habille un nez expressif et frais où des notes sauvignonnées de bourgeon de cassis sont relevées par des arômes de mangue, d’abricot et de pain grillé. En bouche, les notes d’agrumes sont plus présentes, accompagnées de notes boisées élégantes apportant gras et complexité. Un vin de repas qui se complexifie à l’aération.
Note : 90/100
Association : Filet de saumon à la plancha et sa crème d’épinards – Sole aux ceps et aux morilles.
Distribution : Vente directe, Restauration, Caviste, GMS.
Prix départ cave : 9 € TTC
Château Charreau – Tél : 09 61 21 60 13 – chateau.charreau@wanadoo.fr
Le Jury Vintaste est constitué de professionnels du vin : oenologues, journalistes, cavistes, acheteurs…
Pour cette dégustation ont participé parmi les membres de l’équipe Bernard Sirot (Vigneron et Journaliste), Marie-Laurence Porte (Oenologue Enosens), Denis Barse (Marchand de Vin), Mathieu Anglada (Presse), Frédéric Fleuri (Presse), Xavier leclerc et Pascal Hénot (Oenologue Enosens). Photos (c) JB Nadeau.
Restaurant La Maison du Fleuve
Cette dégustation a pu se réaliser dans des conditions optimales grâce à la complicité de Pascal Chollet et de son épouse, propriétaires de cette magnifique adresse dans un cadre à couper le souffle. La mise à disposition du salon privé nous a permis de travailler dans des conditions parfaites, avant de passer à table…
Plus d’infos
Une partie de l’équipe de dégustation – 22 avril 2025 – Restaurant La Maison du Fleuve. Photo (c) Xavier leclerc.